MAYAVADA SUTRA
(de l’Enseignement de la non-existence du monde : notes d’un «sans-nom)
Mayavada: l’enseignement de maya – c’est la tentative de décrire quelque chose d’indescriptible et d’expliquer quelque chose d’inexplicable.
De l’Absolu éternel, immuable émergent des tableaux qui changent et disparaissent : voilà Mayavada : la compréhension de ce qui est, quand il n’y a rien.
L’enseignement de maya est la seule vision du monde qui rend supportables les terreurs du monde et les tragédies de la vie.
La vérité est recherchée par les scientifiques de la nature, est comprise par les philosophes et trouvée par la maya : plus on « sait » moins on est intelligents.
Nos sens sont les plus grands imposteurs. Les hommes jugent l’apparence, jamais l’essence voilà pourquoi chaque jugement est faux. Sur la réalité on peut soit mentir soit se taire : toute logique s’annule et seulement le paradoxe est possible.
Dans l’Absolu il n’y a pas de temps, donc le changement est impossible : on le vit seulement lorsque l’illusion du monde finit. Tout est irréel sauf la Pure Conscience, ce substrat invisible du monde irréel.
Il ne peut y avoir un monde puisqu’il n’a pas d’origine. Un évènement causal se casse si un membre manque – le premier, celui du milieu ou le dernier. Donc dans cet ordre causal du monde, il manque le premier membre. Même si on parle de Big Bang, cela ne l’explique guère, puisqu’il devait y avoir « quelque chose » AVANT qui puisse créer une explosion. D’où venait le matériel qui a explosé ensuite ? Il manque donc l’origine – le premier membre de l’existence du monde. On conclut que le monde visible est un tableau fictif qui n’a pas de signification.
Maya nous console, puisqu’elle démontre que tout est irréel, rien n’est jamais arrivé, pas d’histoire, rien à craindre.
La fin du monde ? Pas d’agitation : un spectacle illusoire s’en va. Le monde serait plus équilibré pourtant si on s’occupait de ses propres problèmes. On s’identifie à des corps qui sont seulement des ombres projetées. Qui veut sauver ou améliorer les autres a besoin de le faire en soi-même.
Tous les corps, subtils, astrals, causals sont seulement le pouvoir d’imagination de la pure Conscience, donc irréels, seul le substrat, le Soi est réel : en deçà de l’espace, donc sans forme ni frontières, ni temps, donc immuable, et sans cause, donc sans origine.
Nous ne sommes pas ‘’dans ‘’ le monde, mais le monde est en nous– un tableau fictif dans lequel apparaissent des personnes imaginaires avec lesquelles on s’identifie faussement.
L’Absolu et notre soi semblent deux en apparence, mais ils sont une seule réalité.
À la question de notre rapport avec l’Absolu, le Bouddha a donné la seule réponse valable : il est resté en silence.
Il n’y a pas de relations qui impliquent une dualité: il n’y a pas d’ «autre». Regarde derrière une pierre et tu vois TOI, derrière une plante ou un animal et tu vois TOI, derrière une personne ou derrière toi et tu vois TOI.
C’est égal si nos corps se manifestent comme « réalisés » ou non-réalisés. Nous sommes déjà libres, même après des années de yoga, etc. car la prison est illusoire comme la liberté.
Le Soi est témoin de la veille, du sommeil et du rêve de la nuit : le quatrième état, turiya, et l’indescriptible turiya-tita qui assiste, est le seul état du Soi dans lequel nous sommes toujours immergés. L’homme est seulement un fantôme ainsi que toute sa vie, ses joies et ses douleurs.
Il s’agit donc d’abandonner le faux et de désapprendre nos connaissances illusoires : nous sommes seulement des marionnettes manœuvrées par l’INCONNU (que nous sommes). Alors où est le libre arbitre ? Nous assistons seulement aux actions d’une personne illusoire. Voilà le moyen de voyager dans la vie sans bagages ni culpabilités. Il n’y a ni bien ni mal.
Celui qui est toujours content dans sa vie ne se souciera pas de rechercher la réalisation.
Toutes nos souffrances se présentent reliées à une « personne » à laquelle on s’identifie : si cette personne se révèle fausse, la souffrance disparait.
Les souffrances qui touchent notre apparence, ont le seul but de nous enseigner que le Soi que nous sommes, n’est jamais touché par elles.
Celui qui se plaint et a toujours peur, est loin de sa Vraie Nature.
L’infini en nous a la nostalgie de l’Infini.
Les dépressions sont la nostalgie (mal du pays) inconsciente de notre patrie transcendante.
Plus on s’extériorise et plus on est sous l’influence de l’hypnose, qu’il y a une matière, un monde et des individus.
La voie de la réalisation c’est un peu comme un échafaud, cela nous coûte la…tête : c’est à dire le sacrifice du moi-JE.
Puisque le Soi est Tout, donc nous ne sommes pas nés, comment pourrions-nous « renaître », nous réincarner ?
La naissance est une illusion qui disparait avec la mort : ce qui est au milieu est tout aussi imaginaire.
Puisqu’il n’y a pas d’individus, comment parler de volonté propre ou libre arbitre pour ce qui n’existe pas.
Sur le plan du monde apparent nous sommes prisonniers, mais sur le plan de l’Absolu nous sommes en deçà de la polarité – liberté-emprisonnement.
Il n’y a pas de relations en vérité, car cela implique une dualité : il y a seulement identité : il n’y a pas « d’autre ». Celui qui existe vraiment est totalement SEUL, unique. Le moi-je est toujours le même Soi dans la bouche de tout le monde.
Le monde n’est pas une projection d’un individu, car l’individu lui-même est une projection-représentation, donc cela est faux.
Le sage n’a pas de pitié, seulement de la compassion (l’autre est lui) : celui qui renonce à tout, gagne tout, car il est déjà mort avant de mourir.
L’apparent but de la vie est rejoint lorsque nous ne sommes plus émus par aucun évènement. Il faut d’abord « vivre » totalement cela, dans l’absence absolue du temps.
Le sage assiste seulement au film de la manifestation sans réagir au bien ou au mal : il est sans désirs. Il n’a pas besoin de guérir ou améliorer quoi que ce soit, le monde n’existe plus pour lui, car tout est bien comme il est.
Le sage et son corps sont comme un couple qui vit ensemble, mais n’a plus rien à se dire. Il est un hologramme, un tableau imaginaire, mais il communique la Réalité Ultime.
L’amour est l’opposé de la haine. Qui aimer ou qui haïr ? Il devrait y avoir un amant et une aimée, donc dualité.
Si on demande à un physicien quantique : – De quoi est faite la terre ? – il répondrait :
– Pratiquement de …rien ! – Si on comprimait les particules atomiques de quoi la terre est faite, il ne resterait presque rien. Même ces particules vont un jour disparaître, mais les physiciens doivent encore le découvrir et un jour ils découvriront ce que les mystiques ont toujours compris. En comprenant l’irréalité du monde toutes les sciences se révèleront des occupations d’un mirage : il apparait mais n’existe pas réellement. Tant qu’on voit encore quelque chose on est encore…aveugles, on voit seulement quand on ne voit…plus rien !
Le karma est seulement une chaîne de tableaux illusoires, donc rien : une loi apparente pour personnes apparentes, donc irréalité. Dès qu’on reconnait le monde comme irréel, aussi le karma le devient. On s’en libère dès qu’on voit qu’il n’y a pas un « agent ».
La mort : on retourne au point d’où on est parti. Seulement l’imagination d’un corps matériel disparait. Pourtant il reste l’illusion d’un corps subtil, astral et causal : tant que cette foi reste, on est sujets à la tromperie d’une réincarnation; l’attachement aux choses matérielles est la graine qui peut nous redonner une forme matérielle. C’est une bénédiction, car la tromperie d’un monde physique s’en va : l’âme ne laisse pas un corps, c’est le Soi qui repousse un corps apparent.
Tout ce qu’un Gourou peut faire c’est enseigner au disciple que ni lui, le Gourou, ni le disciple existent. S’il le fait il est utile, s’il ne le fait pas c’est un charlatan.
Le Sat-gourou est l’Absolu. Quand l’image illusoire du vrai Gourou parle, c’est l’Absolu qui le fait à travers ses paroles.
La « renonciation » n’est pas physique : c’est se retirer du pouvoir imaginatif de la conscience. Cela ne veut pas dire jeter les choses matérielles, mais accepter sereinement si elles disparaissent. Nous ne sommes que les spectateurs d’un film de corps, d’un monde etc.
La plus grande sagesse c’est laisser couler la vie.
On peut seulement être libres de l’erreur d’être un corps qui vit dans un monde matériel. Le corps ne sera pas libre des maux et des limitations, mais on sera convaincus que nous n’avons rien à faire avec lui.
Qui voit dans un coin de la pièce une chaise et dans l’autre un espace vide et réalise qu’ils sont LA MÊME CHOSE, alors il vit le Soi.
L’homme est Conscience Absolue qui assiste aux tableaux changeants et passagers qui émergent de l’Absolu. Voilà Mayavada.
L’enseignement de Maya est la clef pour résoudre toutes les énigmes de la vie, c’est la Vérité qui libère. Souvent elle n’est pas aimée des hommes !
La vérité est simple, ce qui est compliqué contient le sceau du faux.
En reconnaissant les illusions comme illusions on a fait le premier pas vers la Vérité, le deuxième pas, le dernier, c’est lorsqu’on les abandonne.
Tout ce qui est perceptible, visible, est faux : la Vérité est invisible et inconnaissable.
L’Absolu n‘a rien à voir avec ce que nous considérons comme présence consciente. On ne peut pas la comprendre et ne dépend de rien.
L’Absolu existe en deçà de l’espace-temps et de la causalité. Au-delà de l’espace il est infini, au-delà du temps il reste inchangé. Dans notre monde, l’espace-temps est de toute façon apparent (les physiciens l’ont démontré).
Il est en deçà de toute polarité, donc aucun rapport avec la logique, mais seulement avec le paradoxe. Même pas « sans-temps ».
Ce n’est ni quelque chose ni rien, un… non-rien. Ni dualité, ni non-dualité, au-delà de l’Unité et de la Dualité. Au-delà donc des opposés, du savoir et du non-savoir.
Tout ce qu’on connait n’existe pas, il existe seulement ce qu’on ne connait pas.
L’Absolu est le porteur des apparences, mais il n’est pas dans les apparences, ce serait du panthéisme.
Pour l’Absolu rien ne se passe, ni jamais se passera.
On peut le vivre à l’instant dans lequel l’illusion du monde disparait.
Il faut distinguer entre Conscience Absolue que nous sommes et la conscience ordinaire qu’on a et qui fait partie de la personne illusoire. Nous sommes parfaits, mais nous avons une enveloppe qui nous cache. Il n’y a rien à atteindre : nous sommes Cela.
Comment être immortels ? En reconnaissant que nous ne sommes jamais nés. Les corps arrivent et partent, nous restons éternellement les mêmes.
L’Absolu que nous sommes n’a ni prison ni liberté : la seule libération qu’on puisse obtenir est la libération de la fausse croyance d’être enchaînés.
Qu’est-ce un homme? Un fantôme.
La conscience individuelle est l’identification de l’appareil-pensant illusoire avec un corps illusoire.
Avidya-ignorance est la fausse croyance qu’il y a un monde et des individus qui le peuplent. Nous nous identifions quotidiennement avec ces marionnettes.
En comprenant cela, on voyage dans la vie sans valise (concepts, culpabilités etc.)
À la mort rien n’arrive, (comme avant la conception) : nous retournons là d’où on n’est jamais partis.
L’ignorant craint la mort, le connaisseur la désire, le sage reste indifférent si le corps est là ou non.
Les états de samadhi sont illusoires, ils n’ont pas d’importance et n’améliorent pas notre état ni l’empirent.
La réunion apparente avec la Conscience Absolue, arrive dès qu’on réalise de n’avoir jamais été séparés d’elle et jamais nous le serons.
Le désir d’Illumination empêche la compréhension que nous sommes au-delà des opposés, d’ignorance et d’Illumination et le serons toujours.
Celui qui a atteint la Réalisation vit au-delà de l’éternité. Cet état (non-état) est indescriptible en langage humain.
Il y a beaucoup de «illuminés», très peu de «réalisés», au-delà de l’illumination et de l’ignorance.
Tous les ashrams sont des monuments d’illusion et des empêchements, car ils donnent l’impression de se retrouver à la maison et sur le bon chemin.
Mokça n’est pas l’Illumination, mais un non-état au-delà de l’ignorance et de l’Illumination. Mokça est Réalisation : on a abandonné le monde, tout en vivant la vie normalement.
La vraie ascèse c’est se retirer du pouvoir d’imagination de la Conscience.
L’homme ordinaire cherche à se complaire dans l’illusion de la liberté des sens, le chercheur de vérité cherche à se libérer du pouvoir des sens.
Être toujours naturellement le Témoin, est la Réalisation.
Quel besoin d’aider le monde pour qui ne considère plus l’existence d’un monde ?
C’est un signal pour un « réalisé » car il ne demande plus rien, il n‘attend plus rien, ne désire ni n’espère plus rien : il considère cela comme inexistant.
Il accepte donc tout, car le Soi qu’il est ne peut être touché par quoi que ce soit.
Le succès et l’échec sont illusoires, ainsi il ne se réjouit pas du succès ni n’est touché par l’échec : il remercie Dieu, la Vie pour tout ce qu’il lui arrive, soit louanges soit blâmes.
Rien n’a jamais changé, soit présent soit futur, comme pour un enfant, la vie n’est qu’un jeu.
Il est au-delà des opposés, juste et faux. Il pourrait tout faire, mais ne le fait pas : il est seulement le spectateur des pensées, sentiments et agissements du corps-mental. Il n’a plus de tentations ni de buts, car il a reconnu qu’il n’a jamais laissé le but.
Tout est donc un passe-temps. Il reste …un fantôme(hologramme).
Le sage est un tableau fictif, mais sa sagesse vient de la Réalité et dévoile la Réalité.
La dernière Vérité n’est pas prononçable avec des mots « humains » qui sont seulement des indicateurs.
Le seul langage qui peut donc manifester l’enseignement est le SILENCE et la quiétude.
La sagesse est d’apercevoir(voir) qu’il n’y a rien de…visible.
Celui qui a compris (intellectuellement) d’être seulement l’observateur de la manifestation du monde, n’est pas encore arrivé au but : seulement celui qui a reconnu et intégré dans son être entier qu’il n’y a pas de manifestation vraie du monde, vit le Réel.
Ce qui semble laid est seulement une apparence, il n’y a donc rien à gagner ni à perdre dans la vie humaine.
Tout ce qui existe vraiment on ne peut le décrire et ce qu’on peut décrire n’existe pas.
Ce qui reste lorsqu’on a éliminé toutes les fictions, c’est quelque chose d’Innommable.
Tout ce dont on peut parler est faux : tout au plus on peut indiquer, pointer vers la réalité, sinon soit mentir soit se taire.
Nisargadatta Maharaj
Un maître à un étudiant qui voudrait se « réaliser » :
-Tu es le Soi, que tu le saches ou non. Tu es déjà et toujours « réalisé » et tu ne peux pas le devenir. Jette tout le faux connu (la personne, les concepts, les apparences du monde) et ne perds pas ton…temps avec moi, le seul enseignement est le SILENCE : c’est tout ce que je peux t’apprendre.-